Voilà maintenant 12ans que je prends un traitement bi quotidien pour lutter contre les migraines. Je n’en parle quasiment jamais sur mes réseaux sociaux, et que très rarement dans la « vraie vie ».
Je me souviendrais toujours de ma première crise. C’était peu de temps après le baccalauréat, en juillet 2006. Ce matin là, je me réveille chez les parents de mon copain de l’époque, et c’est en prenant ma douche que je m’aperçois qu’un flash dans l’oeil gauche brouille ma vision. C’est très déstabilisant et persistant. Une dizaine de minutes plus tard, le fil lumineux disparait, bizarre. Je rejoins mon copain dans le salon et soudain mon visage se déforme. Tout le côté gauche de mon visage se fige, je le sens mais surtout, il le voit et je lis l’inquiétude sur son visage. Rapidement mon bras gauche s’engourdis, je ne peux plus serrer la main. Très vite, on décide d’aller aux urgences. Un AVC ? La prise en charge est longue aux urgences, une douleur vive au dessus de mon oeil droit apparait. La douleur est très précise et insistante.
Après 3 heures d’attente interminables, je suis prise de vomissements pendant presque 1 heure. Je suis exténuée, vidée de toute énergie et la douleur au dessus de mon oeil persiste mais commence à diminuer en intensité. La première crise est passée…
Le diagnostic a été posé très rapidement : migraine accompagnée de forme héréditaire. Il en existe un nombre de formes multiples, et il semblerait que je combine l’ensemble des symptômes en une, youpi ^^
Pour ce qui est du traitement…ça a pris beaucoup plus de temps.
Les deux années qui ont suivies ont été un véritable calvaire. Au départ, certains évènements du quotidien provoquaient ces crises. Puis elles se sont mises à apparaitre sans raison et ce, de plus en plus souvent. Les traitements one-shot au moment des crises ne faisaient qu’amplifier les symptômes. Je devais tout noter dans un carnet pour essayer de les traiter au mieux, de comprendre le pourquoi du comment. J’avais appris à détecter toutes les étapes : flash dans l’oeil, paralysie du visage, engourdissement du bras, et de la jambe selon l’intensité de la crise, douleur au dessus de l’oeil, passage dans un état second, lutte du corps puis vomissements. J’avais développé certains rituels, comme manger un plat de pâtes, dans le noir, dès le premier quart d’heure de la crise pour anticiper l’effort que mon corps allait devoir produire pour lutter contre elle et, pardonnez moi les détails, mais avoir de quoi vomir le moment venu. Vomir était d’ailleurs devenu un soulagement puisque cela signifiait que le pire était passé. Pendant les 48heures qui suivaient, mon corps portait les stigmates de la crise : fatigue, yeux gonflés de cernes et de poches noires sous les yeux, douleur latente au dessus de l’oeil et faible appétit.
Au fil du temps, les crises devenaient de plus en plus intenses et insupportables, jusqu’à LA crise de trop. Le neurologue que j’ai rencontré peu de temps après celle-ci avait appelé ça « le syndrome du poignard ». J’avais effectivement eu la sensation qu’on m’avait planté un poignard dans le front quand ma crise s’est déclenchée. Physiquement je n’en pouvais plus, je venais d’enchainer 3 crises en 2 semaines et moralement je commençais à me dire que ma vie serait un enfer, à peine remise que je m’en tapais une nouvelle. C’est à ce moment que le neurologue a décidé de mettre en place un traitement quotidien, ce qu’ils appellent un traitement de fond, car je cite « c’est dans ce type de situation qui empêche d’avoir une vie normale qu’on opte pour ce type de traitement ».
Par chance, le premier traitement fut le bon. Cela aurait pu prendre un temps fou pour trouver, car on ne connait pas vraiment les causes de ces migraines finalement. Mon traitement lui agit sur les récepteurs adrénergiques béta (sur la gestion de mon adrénaline).
Aujourd’hui, je vous en parle surtout car il s’agit d’une réelle maladie. Les recherches à ce sujet sont rares. Et l’amalgame avec les maux de tête a tendance à fortement m’agacer. Croyez moi que si j’avais seulement mal à la tête, je ne me taperais pas un traitement deux fois par jour depuis 12ans qui décale ma fenêtre cardiaque et agis sur mon adrénaline…car tout ça n’est pas sans effet secondaire.
Lorsque j’étais salariée et que mon copain appelait pour dire que je ne pouvais pas venir travailler à cause d’une crise, je n’étais pas prise au sérieux. « Oui, bah moi aussi j’ai la migraine, tu prends un doliprane et hop ». Evidemment Martine…je vais faire ça. Martine, qu’on soit clair, si t’avais une migraine, tu n’arriverais même pas à parler, à réfléchir et encore moins dire des conneries pareilles. Tu ne supporterais pas le propre son de ta voix, la moindre lumière t’aveuglerait et la douleur t’empêcherait d’être bête. Tu serais contente de vomir et si je le pouvais je viendrais le faire sur ton bureau pour que tu comprennes que la réalité d’une migraine, ce n’est pas un doliprane qui va la changer.
Certaines maladies, comme certains handicapes, parce qu’ils se voient pas ne sont pas pris au sérieux. Il est donc important de se renseigner avant de juger, ou du moins d’être à l’écoute, sans préjugés et sans faire d’amalgames.
3 Commentaires sur “#254 – Non, je n’ai pas mal à la tête, je suis migraineuse”
Je comprends tellement ! Mon ancienne belle mère est sujette à des migraines et des fois ça peut durer plusieurs jours et c’est vraiment affreux de la voir dans cet état…
Tellement ça….je n’ai toujours pas trouvé de traitement et j’en ai depuis que je suis en cm1…soit depuis 13 ans…au minimum 1 par mois…bref je comprends !!! Et les vomissements je ressens pareil…une delivrance car je sais qu’après ça va redescendre dans les 10h qui suivent…
Et quelle culpabilité pour le travail d’etre absente et d’etre incomprise..
En tout cas tant mieux si tu as trouvé ton traitement..! Tu dois revivre !
Bonjour,
Je viens de trouver ton article que tu avais repartagé sur une story Instagram, je te remercie de l’avoir rédigé, être migraineuse est un calvaire que beaucoup de gens ne comprennent pas, la douleur et son poids sur le quotidien sont inexplicables à ce(ux)elles qui ne l’ont jamais vécu. Pourrais-tu me donner le nom de ton traitement ? Je suis en difficulté pour en trouver un qui me convienne comme beaucoup d’entre nous … Merci encore pour tes mots sur nos maux ! Clara